Droits TV : DAZN menace de rompre avec la LFP, la Ligue 1 en sursis

Alors que les clubs attendent encore 140 millions d’euros de la part de DAZN, le diffuseur britannique pourrait bien jeter l’éponge dès la fin de saison. Entre médiation laborieuse, engagements non tenus et menaces de rupture anticipée, le football français vacille sur ses fondations télévisuelles.
Une collaboration sous haute tension
Le torchon brûle entre DAZN et la Ligue de Football Professionnel. Après avoir déboursé une moitié d’échéance en février, la plateforme de streaming menace de ne pas régler la prochaine tranche prévue pour le 30 avril, soit près de 70 millions d’euros. Plus grave encore : elle envisage très sérieusement de rompre son contrat de diffusion à l’issue de cette saison, sans attendre la clause de sortie prévue initialement en décembre 2025.
En jeu, 140 millions d’euros encore dus aux clubs de Ligue 1 pour cette saison, dont le versement semble de plus en plus compromis. Pour tenter d’éviter la rupture, une médiation a été mise en place depuis le 28 février. Un médiateur respecté et compétent a pris les commandes des discussions, seul interlocuteur désormais entre les deux parties. Si la communication est devenue moins agressive, le fond des problèmes, lui, reste intact.
Des engagements non respectés selon DAZN
L’un des points de crispation majeurs réside dans le manque d’accès accordé à DAZN pour valoriser les droits acquis. Le diffuseur déplore un respect très partiel de son plan d’action, pourtant pensé pour rehausser l’attractivité du produit Ligue 1. Ce plan comprenait l’accès privilégié à des interviews de joueurs stars et la possibilité de tourner des contenus exclusifs au sein des clubs. Or, selon DAZN, les clubs ne jouent pas le jeu.
Cette mauvaise volonté perçue pousse la plateforme à réclamer un nouveau modèle de rémunération avec une part variable indexée sur le respect d’engagements très concrets de la part des clubs. En clair, si ces derniers ne s’investissent pas davantage dans la valorisation de la Ligue 1, ils pourraient toucher moins d’argent. Ce mécanisme viserait à responsabiliser chaque acteur du championnat.
L’épine du piratage et une loi qui tarde
Autre point noir : la lutte contre le piratage. DAZN attend des mesures fermes et concrètes. Un projet de loi porté par le sénateur Laurent Lafon pourrait répondre en partie à cette attente, mais son éventuelle entrée en vigueur n’est pas prévue avant fin 2025. Trop tard, estime le diffuseur, qui voit chaque semaine ses images diffusées illégalement sans réel moyen de rétorsion.
Dans ce climat tendu, DAZN commence à perdre patience. Son coup d’éclat de février — ne payer que la moitié de l’échéance — visait à provoquer une réaction de la LFP et des clubs. Mais faute de résultats, la plateforme britannique semble résolue à claquer la porte plus tôt que prévu.
Un bras de fer aux allures de divorce
Selon les informations de RMC Sport, DAZN aurait déjà fait savoir à la LFP son intention de mettre un terme à son contrat à la fin de cette saison, après seulement un an de diffusion. Une décision précipitée qui contournerait la clause de sortie initiale et plongerait la Ligue dans un nouvel imbroglio juridique.
La LFP, elle, refuse de céder à la panique et voit dans cette annonce une manœuvre de négociation. Elle a promis de renforcer les sanctions à l’encontre des clubs qui ne respectent pas leurs obligations, avec des amendes plus lourdes à la clé. Mais ces menaces ne semblent pas impressionner DAZN, de plus en plus pessimiste quant à l’avenir de son engagement avec le football français.
La Ligue à la recherche d’un plan B
Face à ce potentiel désengagement, la Ligue n’a d’autre choix que d’explorer des solutions de repli. Mais une clause du contrat en cours empêche toute discussion avec d’autres diffuseurs pour l’instant. DAZN, de son côté, pourrait lever cette clause moyennant contrepartie, ouvrant ainsi la porte à une renégociation globale du paysage audiovisuel de la Ligue 1.
Lors du collège de Ligue 1 du 14 février, Joseph Oughourlian, président du RC Lens, avait déjà exhorté la Ligue à préparer une alternative. Pour lui, l’urgence ne réside pas dans la trésorerie à court terme, mais bien dans la qualité du produit sur le long terme. L’idée d’une chaîne produite en interne par la LFP reste donc sur la table comme possible sortie de crise.
Vers un nouveau séisme financier ?
À l’heure où la saison touche à sa fin, l’échéance du 30 avril s’annonce comme un tournant. DAZN menace de ne pas verser la totalité de la somme due si les engagements précis des clubs ne sont pas respectés. Ce nouveau coup de pression place la Ligue dans une situation financièrement précaire, avec des clubs déjà fragilisés qui risquent de voir leur équilibre économique vaciller.
Plus qu’un simple conflit contractuel, c’est l’ensemble de la stratégie de valorisation de la Ligue 1 qui est remis en cause. La médiation pourrait durer encore plusieurs semaines, mais le temps presse. Si aucun accord n’est trouvé, le football français pourrait se retrouver sans diffuseur et sans visibilité à l’aube d’une nouvelle saison. Une perspective aux airs de cauchemar pour un championnat qui peine déjà à s’imposer sur la scène européenne.